Granulés plastiques industriels sur le littoral français

 

(Manche-Mer du nord / Mer Celtique/ Golfe de Gascogne / Méditerranée)

 

 

 

Rapport initial

 

 

Connaissances antérieures & missions d’évaluation initiale

pour le Dr. François Galgani de l’IFREMER – LER/PAC.

Mise en œuvre de la DCSMM / BEE : Descripteur 10

 

 

 

 

 

        

 

Mai 2009 – Mise à jour Novembre 2011

 

 

SOMMAIRE

1)   Avant propos

2)   Les granulés plastiques industriels dans le milieu marin

a)   Origine

b)    Devenir

c)    Déchets similaires observés

3)   Notre méthode d’observation

4)   Les observations

a)      Sous-région Manche - Mer du Nord

b)       Sous-région Mer celtique

c)       Sous-région Golfe de Gascogne

d)       Sous-région Méditerranée

5) Autres déchets anthropiques

a)      Les médias filtrants

b)       Les géotextiles

c)       Résidus de production, de fabrication ou d’utilisation ?

6) Surveillance et diminution de cette pollution.

 

FIGURES

                I.                    Un prélèvement de pellets                                             page 3

              II.                    Critères imagés                                                              page 9 & 10

            III.                    Carte de France des observations                               page 11

           IV.                    Carte de France des prélèvements                              page 12

             V.                    Granulés noirs biscornus & spectre infrarouge           page 13

           VI.                    Granulés blancs mats Seine                                          page 15

         VII.                    Granulés Saint-Cava : spectre infrarouge                    page 16

       VIII.                    Granulés petits rouges d’Aquitaine                               page 18

           IX.                    Courant d’Huchet                                                           page 19

             X.                    Granulés rouges « Fos » et pastilles ambrées            page 22

           XI.                    Médias filtrants                                                               page 23

         XII.                    Carte de France des granulés caractéristiques          page 27

 

ANNEXES

1.                                 Cahier de terrain :

                  Observations des granulés plastiques sur le littoral en 2011.xls

2.                                 Quantification de la laisse historique par critères imagés.pdf

3.                                 Document macrodéchets et géosynthétiques.pdf

 

1)   Avant propos

 

L'association SOS Mal de Seine, basée en Haute-Normandie, a participé au Grenelle de l’Environnement sur les déchets en milieu aquatique et au Grenelle de la Mer. Les buts de l'association : Information sur l'état de pollution des milieux aquatiques par les macro-déchets. (Inventaire des zones d’accumulations préférentielles de macrodéchets sur la Seine, les lacs et rivières, dans les bassins portuaires et sur le littoral)

 

Ce rapport est établi pour rendre une évaluation initiale (une étude préliminaire) sur la présence des granulés plastiques industriels sur le littoral français (Sous régions Manche-Mer du nord/Celtique/Golfe de Gascogne/Méditerranée).

Cette étude a été rédigée dans l’urgence (ce qui explique son style). J’ai souhaité prendre plus de temps sur le littoral que devant mon ordinateur, pour ramener plus d’observations. Je me suis donc imposé un calendrier intensif.

Cela doit permettre au Docteur François Galgani (référent "déchets en mer" au MEDDEM) d’avoir plus d’éléments concernant les granulés plastiques industriels pour ses rapports sur le descripteur 10 du Bon État Écologique : «Propriétés et quantités de déchets marins ne provoquant pas de dommages au milieu côtier et marin»

Il s'agit du processus européen de mise en œuvre de la directive cadre stratégie pour le milieu marin (DCSMM). (convention IFREMER / Ministère de l’Environnement)

 

2)   Les granulés plastiques industriels dans le milieu marin.

 

a)   Origine

 

La présence de cette matière plastique de synthèse est scientifiquement observée depuis les années 70 sur toutes les plages du Monde.

(Carpenter & al - 1972, Gregory & al - 1978, Shiber & al – 1979)

 

Les granulés plastiques industriels sont des petites billes, cylindres ou pastilles de plastiques. Ils sont fabriqués et utilisés dans l’industrie pour la confection de tous nos objets en plastique.

Ils peuvent être en plastiques recyclés ou provenir directement de la transformation du pétrole, du gaz ou de la biomasse.

(Exemple du Polyéthylène : toujours non-biodégradable, issu de la transformation chimique de la canne à sucre)

 

Leur taille est inférieure à 10 mm et ils se confondent bien souvent avec les sédiments. Ils peuvent être de toutes les couleurs. Les couleurs les plus rencontrées sont les nuances de blanc translucide, blanc grisâtre, blanc jaunâtre, l’ambré et le noir.

 

 

Les causes possibles de leur dispersion dans le milieu naturel sont variées.

 

·       Les fuites à la production industrielle :

Durant le « process », le conditionnement, le stockage, les nettoyages. Ils rejoignent les réseaux d’eaux usées ou les réseaux d’eaux pluviales (donc les stations d’épuration) ou directement les fossés puis les cours d’eau.

 

·       Les fuites au transport :

Problèmes aux chargements, incidents de manutentions, contenants percés ou lors d’accidents de la route.

 

·       Les pertes de conteneurs ou de marchandises en mer :

Durant les naufrages ou par les fuites des contenants.

 

·       Les pertes à la transformation :

Même risque de fuites qu’à la production et rebus ou incidents de transformation (déchets)

 

·       Les pertes à l’utilisation :

Microbillage, dispositif filtrant, drainant, nettoyant, lustrant, absorbants anti-pollution.

 

·       Des utilisations inappropriées :

Pour les pistes et carrières de chevaux, pour le déplacement de charges lourdes, les déménagements, etc.

b)   Devenir

 

Les granulés plastiques industriels deviennent parfois des déchets avant même d’avoir pu être utilisés. Les pertes peuvent se produire très loin en amont dans les terres et suivre le cycle de l’eau.

On les retrouve sur les rives ou les berges, dans les canaux, dans la laisse des fleuves et rivières, dans les bassins de plaisance, les bassins portuaires ou industriels, en mer, dans la laisse de mer et sur la plage…

 

Les granulés plastiques industriels de densité inférieure à l’eau vont flotter, dériver, s’échouer. Les granulés flottants s’échouent ; ils restent piégés dans les sédiments, les enrochements, les macro et micro déchets, les végétaux, les polluants organiques. Cette pollution plastique est parfois très localisée ou s’accumule sur des centaines de mètres de rivages mais souvent sur une faible largeur (quelques centimètres à quelques mètres).

De nombreux paramètres influent sur l’accumulation de ces microdéchets flottants et dérivants : morphologie et nature du site, courants, marées, batillage, vents dominants, conditions météorologiques, …

On les retrouve parfois en quantités significatives et relativement importantes sur des plages du détroit de Calais, sur toute la coté Aquitaine ou autour du delta du Rhône.

On les découvre dans des lieux improbables : Baie de Somme, Ile d’Ouessant, Courant d’Huchet, Camargue…

Les fleuves sont naturellement des vecteurs de cette pollution. (La Seine, Le Rhône, etc…)

Les zones industrielles et portuaires sont des zones de pertes avérées (anciennes ou récentes) à examiner, contrôler… (Le Havre, Fos-sur-mer, etc…)

 

Les granulés plastiques industriels de densité supérieure à l’eau coulent.

Ils ne sont pas concernés par cette étude initiale du supralittoral. Nous pensons qu’ils représentent au moins la même quantité que les granulés de polymères flottants. (Voir Plastiques en Europe 2010 : faits et chiffres, page 10)

Les nombreux additifs et charges augmentent la densité des granulés théoriquement flottants. La souillure, le fouling et l’amalgame entraînent également les granulés flottants vers le fond.

 

Certains granulés plastiques industriels s’érodent plus que d’autres, dans le milieu aquatique plus ou moins agressif. Des granulés ont visiblement des tailles d’environ 1 mm. Nous avons remarqué cela grâce aux couleurs caractéristiques (confirmé par le point de fusion en calorimétrie différentielle à balayage et par les spectres caractéristiques en spectroscopie Infrarouge à Transformée de Fourier). L’assaut des vagues sur le littoral peut les faire « fondre » comme un galet de silex.

 

Le milieu marin et côtier s'engraisse inexorablement de nos molécules chimiques synthétiques, de matière plastique au rythme des rejets, des fuites et des pertes.

 

Une fois dans le milieu naturel, ces petits plastiques manufacturés sont difficilement récupérables. Il faut agir immédiatement contre une pollution qui se disperse très vite dans les milieux aquatiques.

Le nettoyage de ces plastiques échoués sur les rivages peut s’avérer très complexe (les cribleuses de plages sont inefficaces) voir impossible (rochers ou plages de galets).

Comme toujours, la prévention des accidents et des incidents est impérative.

Un nettoyage complet est illusoire puisqu’une partie de la pollution est inaccessible : dans les rivières, dans la mer ou au fond des eaux, presque indécelable…

Cette pollution est donc sournoisement accessible à de nombreux êtres vivants.

 

De nombreux mammifères marins, des oiseaux, toutes les espèces de tortues marines, des poissons et des invertébrés sont connus pour ingérer accidentellement du plastique. (Katsanevakis, 2008, Gregory, 2009, etc…)

L’oiseau emblématique de cette ingestion erronée en Europe du Nord :

Le Fulmar boréal (Fulmarus glacialis), aussi appelé Pétrel fulmar.

 

95% de ces oiseaux marins retrouvés morts dans la zone Manche / Mer du Nord ont du plastique dans l'estomac. (Van Franeker et al., 2005)

Les scientifiques retrouvent des granulés industriels dans certaines dissections.

Ces plastiques ingurgités ont « naturellement » des conséquences négatives pour la reproduction et la survie de l’oiseau…

 

Les granulés plastiques adsorbent les polluants organiques (ou métalliques) et peuvent relarguer leurs nombreux additifs.

(Termes scientifiques : Adsorber = absorber en surface, relarguer = diffuser, répandre…)

De même, ils peuvent faciliter le transfert d'espèces exotiques sur de grandes distances. En devenant de plus en plus petits, les granulés vont facilement être absorbés ou ingérés par les organismes vivants.

 

Nous redoutons l’impact de ces plastiques sur notre environnement…

 

c)   Déchets similaires observés

 

Une méprise existe sur le terme « larmes de sirènes ». Celui-ci englobe les fragments de plastiques, de verres ou de minéraux de toutes sortes érodés par l’eau. Les fragments de plastiques, polis par la force de l’eau, gardent souvent leur forme géométrique originelle. Ils ne peuvent pas ressembler à un granulé manufacturé. (en principe)

 

Des granulés prélevés comme étant des pellets semblent être en réalité des médicaments ou des comprimés qui se fragmentent.

De très petits granulés peuvent être de la poudre de polymères (granulométrie de quelques dizaines de microns), des microbilles dures de polystyrène mais aussi des microbilles de tamis moléculaires si elles s’écrasent facilement.

 

Les sphérules de polystyrène sont issues de la fragmentation des blocs de polystyrène expansé (PSE).

Elles proviennent de la dégradation des protections d’emballages, des contenants isothermes alimentaires, des matériaux en PSE utilisés dans le bâtiment et les travaux publics. Elles peuvent être directement perdues par les producteurs, les utilisateurs, par le traitement des eaux (biofiltres ? ), etc…

Elles sont parfois visibles en grandes quantités sur les rivages.

Ces microbilles de plastique, molles et très légères, ne sont pas concernées par cette étude.

 

3)   Notre méthode d’observation

 

Nous avons mis en place un protocole d’observations simple et rapide.

Nous parcourons le littoral pour inspecter les accumulations créées par les laisses de mer.

Généralement, nous trouvons la dernière laisse de mer, quelques-unes moins récentes intermédiaires, puis la laisse de mer la plus ancienne.

Cette dernière zone d’accumulation ou laisse de mer «historique» se trouve dans l’espace du littoral supérieur aux hautes mers de vives eaux : le supralittoral.

Nous observons les granulés dans les sédiments des plages, des berges, dans les enrochements naturels ou artificiels, au milieu des végétaux, des macro et microdéchets.

Si les lieux sont propices à l’échouage définitif, nous examinons le littoral sur des centaines de mètres. Certaines berges ou dunes érodées montrent que les laisses de mer sont reprises par les marées ou les houles suivantes.

Nous essayons d’imaginer le phénomène d’échouage, de remobilisation et de reprise. Nous essayons d’apprécier comment se déroule l’accumulation sur chaque site, de comprendre la possibilité de dispersion des granulés (masses inférieures à 100mg).

Nous explorons le gradient de granulés éparpillés au milieu des débris naturels et anthropiques. Nous prélevons en même temps dans un sachet les microdéchets et les granulés caractéristiques d’une plage.

Nous avons mis en place des critères imagés pour pouvoir exprimer la densité de granulés présente dans la laisse « historique » (ancienne) sur une bande de vision d’environ 0,5 mètre de large sur 1 mètre linéaire. (La laisse fait rarement un mètre de large)

 

La densité est désignée ainsi dans la colonne densité du fichier Excel d’observations :

         Discrète : moins de 25 granulés visibles en surface sur environ un mètre linéaire.

         Faible à moyenne : plus de 25 granulés visibles en surface sur environ un mètre linéaire.

         Forte à très forte : « Impression » d’une présence massive avec peu (ou très peu) de sédiments (ou de débris). L’impression peut se poursuivre en profondeur (très forte densité).

Voir figures des critères imagés pages 9 & 10.

La qualification de la laisse historique par critères est plus précise dans les commentaires du fichier et pour la carte de France des observations.

L’étendue de l’accumulation est évaluée « ponctuelle », si elle est très limitée sur quelques cm2 ou m2, ou « linéaire » si elle suit le littoral. L’étendue linéaire est dite faible si elle s’étend sur quelques mètres, elle est dite moyenne si elle s’étend sur des dizaines de mètres. L’étendue linéaire est dite forte si elle se prolonge sur une centaine de mètres ou plus.

La notion de largeur de la ou des zones d’accumulations peut augmenter l’impression de pollution et le classement du site. Ces critères sont imprécis mais permettent de qualifier les sites pollués autant que faire se peut.

 

Nous avons mis en place également un protocole de prélèvement des granulés simple et rapide, que nous pensions assez représentatif et reproductible. Ce protocole a été expérimenté sur les rives de l'estuaire de Seine (depuis le dernier barrage jusqu'à la mer) : une zone presque idéale. Les incertitudes sont beaucoup plus grandes à l’échelle des côtes françaises de métropole.

Les prélèvements concernent des sols tous très différents : sable, terre, fin, mou, dur, rochers, cailloux, graviers, galets, vases plus ou moins compactes…

Les prélèvements dans du sable très fin et profond sont difficiles. (voir impossible avec cette méthode) Le protocole évolue toutefois au fil de nos expériences et semble donner des tendances.

Le protocole est le suivant : Nous recherchons visuellement en surface la plus forte densité de granulés dans l’accumulation « historique ».

Nous examinons les environs pour appréhender la nature du sol et sonder la présence en profondeur si cela est possible. Nous prélevons dans le maximum d’accumulation visible, les granulés, les sédiments ou végétaux et les débris plastiques (items inférieurs à 20 mm), dans un pot de laboratoire de 132 cm3.

La couche de petits déchets est enlevée en un point jusqu'au sol dur (ou sur une profondeur maximum de 50 mm). Le cercle de prélèvement est élargi jusqu’au remplissage du pot.

Le tri des billes, cylindres et pastilles de plastiques est réalisé à l'aide de tamis et d’une pince brucelle. La fraction de granulés plastiques industriels obtenue est pesée. On obtient des concentrations en masse de granulés par litre d'échantillon.

Cela complète l’examen visuel, les critères imagés et les photographies que nous avons pu faire.

Les prélèvements avec des taux qui s’approchent ou dépassent les 100 g/l de « pellets »* dans le maximum de l’accumulation « historique » concernent des sites relativement très pollués, probablement à proximité d’une source de diffusion ou de perte. (100g/l Soit plus de 3000 granulés par litre de sédiments soit 3 bouteilles plastique de 1,5 litres)

Pour chaque site visité, il faut échantillonner (à part) les spécimens de granulés récurrents mais différents du dégradé de blancs translucides habituel. C’est le seul moyen de trouver des caractéristiques communes à plusieurs sites et de remonter vers une possible explication de la dispersion des « pellets* ».

 

(* Pellets de l'anglais plastic resin pellets ou industrials granules ou nurdles)

 

Critères imagés des densités de pollution (colonne du fichier d’observations)

 

 

La densité est désignée dans la laisse de mer :

 

 

         Discrète : moins de 25 granulés visibles en surface sur environ un mètre linéaire.

         Faible à moyenne : plus de 25 granulés visibles en surface sur environ un mètre linéaire.

         Forte à très forte : « Impression » d’une présence massive avec peu (ou très peu) de sédiments (ou de débris). L’impression peut se poursuivre en profondeur. (Densité très forte)

 

Densité discrète

 

 

Densité faible

 

Densité moyenne

 

Densité forte

 

Densité très forte

4)             Les observations

 

Carte de France des observations

 

 

Lien vers la carte à échelle modifiable (google map)

 

Voir annexe 1 pour plus de détails :

Fichier Excel «Observations des granulés plastiques sur le littoral en 2011 »

La coloration rouge des cellules signifie une observation de la densité et/ou une concentration et/ou une étendue remarquable.

 

Carte de France des prélèvements

Lien vers la carte à échelle modifiable (google map)

 

a)   Sous-région Manche - Mer du Nord

 

Une mission a été réalisée au départ de la frontière belge en direction du sud. L’idée première était de voir l’état du littoral autour du grand port industriel de Dunkerque.

Mais aux abords immédiats et au sud de la zone portuaire, je n’ai pas trouvé de présence importante de granulés plastiques. (Observations à poursuivre vers le nord en Belgique ?)

Je souhaitais constater moi-même l’état de pollution des sites naturels d’Ambleteuse et de St-Etienne-au-Mont (témoignages apportés respectivement par le Dr Van Franeker d’IMARES et l’association Robin des Bois)

Je n’ai pas trouvé d’explications évidentes sur l’état de pollution des plages de Calais, Sangatte, Ambleteuse, Boulogne-sur-mer et Saint-Etienne-au-Mont.

Mais j’ai trouvé une caractéristique :

Tous les prélèvements réalisés sur la zone contiennent environ 50% de granulés noirs et difformes (blancs translucides pour le reste). Ces granulés cylindriques biscornus sont en polyéthylène (PE Hourdel : fusion environ 120°c et spectre IR caractéristique).

Nous (et les autres associations : Robin des bois, Surfrider,…) les appelons « granulés recyclés ».

Je n’ai aucune certitude sur cette provenance. (à vérifier chez un producteur ou un négociant)

Zone de Texte: HourdelZone de Texte: Polyéthylène                       

Noirs biscornus

 

Ces granulés plastiques industriels échoués sur cette zone pourraient-ils venir de l’estuaire de la Seine ? La présence de ces granulés biscornus au niveau de la baie de Somme pourrait le faire penser (50%), mais ils n’existent pas sur les rives de la Seine normande et ils sont peu nombreux dans les échantillons du Havre. (10%)

On les trouve pourtant dans toute la Manche orientale, depuis Saint-Vaast-la-hougue (30%) jusqu’à Calais (50%) puis Dunkerque-Gravelines (50%).

Ils sont même visibles sur des vidéos de l’île de Texel aux Pays-bas.

S’agit-il d’une vieille pollution du port du Havre ?

Pourraient-ils venir d’Angleterre ?

La connaissance des courants et du déplacement des masses d’eaux de surface pourrait inciter à étudier ces hypothèses. Malgré le flux et reflux des marées en Manche, une orientation résultante vers le nord pourrait faire dériver ces granulés dits « recyclés » dans la baie de Seine et vers le détroit de Calais. (?)

En générale, l’accumulation de granulés plastiques industriels sur ces plages du Nord de la France a été constatée dans les végétaux, mélangée avec les micro et macrodéchets, en surface ou à demi enterrée.

Je n’ai pas remarqué de dispersion puis de concentration créée uniquement par les vents (phénomène rencontré plus tard en Méditerranée). J’ai vu des granulés rouler sur la plage mais pas d’accumulation flagrante en pied de dune (sauf à l’embouchure de la becque à St-Etienne-au-Mont).

Sont-ils enterrés progressivement dans le pied de dune comme les macro-déchets ?

Je n’ai pas pu le vérifier…

Je n’ai pas vu d’accumulation ancienne due à des vives eaux importantes sauf ponctuellement à Ambleteuse dans le lit majeur de la rivière Slack et dans le Marais de L’Aa.

J’ai observé des plages très fréquentées mais polluées par les pellets sur de grandes largeurs (Calais-Sangatte & Boulogne).

J’ai observé à Calais-Sangatte une présence importante et récente de médias-filtrants de type « Seine » ; 5 à 10 au mètre linéaire… Ce sont les mêmes que ceux qui ont envahi la vallée, le Parc Naturel des Boucles de la Seine normande puis l’estuaire aval depuis mars 2010. (Voir les généralités sur ce nouveau plastique dérivant page 22)

 

Baie de Somme

 

Au nord de la baie de Somme, à l’embouchure artificielle de la rivière de la Maye, quelques granulés blancs translucides sont venus se déposer très loin de la haute mer, sur la digue de sable de la réserve naturelle du Marquenterre. (Pas de noirs «recyclés»)

Au sud de la baie de Somme (pointe du Hourdel), le littoral alterne entre bancs de sables et galets, l’estran se découvre en pente assez douce. J’ai pu constater le dépôt de grandes plaques de végétaux de la baie sur les bancs de galets et en accumulation sur le supralittoral. Les micro et macrodéchets abondent souvent dans ces amas, les granulés aussi : ce sont à 50% des noirs «recyclés » comme dans le détroit de Calais.

 

Estuaire & Baie de Seine

 

Ce sont mes premières découvertes de granulés plastiques industriels.

J’ai découvert en premier la très forte accumulation de pellets dans le port de plaisance, ouvert sur la mer, de la ville du Havre. (Les lieux ont été fortement modifiés au deuxième semestre 2011 mais la pollution reste visible) L’incroyable amas, sur plusieurs centimètres (mètres ?), au milieu des enrochements artificiels, m’a incité à poursuivre plus attentivement mes recherches régionales sur les zones d’accumulations préférentielles de microdéchets.

J’avais trouvé des images plus fortes que celles découvertes durant ma participation au groupe de travail sur les déchets en milieu aquatique, présidé par l’association Robin des Bois (grenelle de l’environnement -2009).

La densité était forte à très forte, l’étendue moyenne (38 x 3 mètres environ), la prédominance des granulés était blanche translucide avec tout le dégradé habituel.

J’ai ensuite pu constater que les pellets étaient présents et visibles sur tous les rivages naturels de la Seine normande (en aval du dernier barrage). La prédominance du dégradé de blancs translucides est valable jusqu’à l’estuaire (environ 160 Km).

En souhaitant quantifier la présence de ces billes plastiques dans l’accumulation ancienne de débris échoués sur les rives du fleuve, j’ai pu observer que l’ensemble de mes prélèvements comportait des granulés récurrents : des blancs mats. Leur présence se retrouve également dans l’estuaire (Honfleur et le Havre) mais légèrement « diluée »…

Il n’y a pas de pellets « recyclés » dans mes prélèvements fluviaux.

  Blancs mats Seine

En janvier 2011, je suis revenu sur certaines rives de la Seine déjà visitées.

J’ai trouvé une forte accumulation sur des sites que j’avais parcourus uniquement pour la présence de macrodéchets. La pollution par les pellets ne saute donc pas aux yeux, elle peut passer inaperçue si on ne connaît pas cette matière synthétique, on peut la prendre pour de simples graviers.

La Seine, qui charrie une quantité impressionnante de macrodéchets, est donc aussi un exutoire à granulés plastiques industriels.

Durant les prochains mois, j’espère pouvoir prospecter plus attentivement le littoral haut et bas-normand : je reviendrais sur les zones d’accumulation que je connais, pour y déceler d’éventuelles traces de pellets.

Mais en Haute-Normandie, les galets empêchent d’apercevoir ces microdéchets, ils tombent sans cesse entre les silex polis. Le pied des falaises léché par la mer empêche souvent les dépôts, les bancs de galets ne sont pas stables et se déplacent vers le nord le long de la muraille de calcaire. Les observations seront difficiles à repérer.

En Basse-Normandie, sur ce que j’ai pu visiter de la cote Est, les courants et les vents me semblent peu propices à une forte accumulation de débris. Je pense (d’après mes lectures) que ce qui sort de l’estuaire du grand fleuve monte vers le nord en partie.

Les granulés noirs « recyclés » ne viennent pas du fleuve mais cela n’exclut pas une perte au niveau du port du Havre (je n’en ai pas remarqué dans les bassins autorisés). Une perte havraise aurait-elle pu diffuser jusqu’à Saint-Vaast-la-Hougue en même temps que vers le détroit de Calais ?

 

La pointe est du Cotentin a été visitée durant l’été 2010, avec pour unique but la recherche de ces billes de plastiques.

On peut parler pour l’instant de quasi-absence sauf devant le fort de Saint-Vaast-la-Hougue, juste en face des parcs à huîtres. Les pieds du fort colonisés par une végétation maritime (Suaeda) ont piégé des pellets sur quelques mètres (côte sous le vent). Les granulés noirs « recyclés » sont présents à 30% dans ces prélèvements.

Je pense avoir mis en évidence une caractéristique des dépôts visités sur les côtes françaises de la Manche orientale et de la Mer du Nord : les granulés noirs « recyclés » biscornus. (L’association Robin des Bois avait déjà remarqué cette singularité dans le Nord)

 

 

 

Manche occidentale

 

La pointe ouest du Cotentin (anse de Vauville) est propice aux dépôts de débris, on les retrouve très fragmentés (côte exposée aux vents) mais ces zones d’accumulations ne contiennent visiblement pas de granulés ? (Présence anecdotique sur des plages difficiles ou impossibles à étudier)

La présence des pellets est remarquée à Cancale (prélèvement IPW / Dr.Takada), puis par moi à St-Cava (Plouguerneau) et Porspoder, de façon très ponctuelle, mais uniquement des granulés blancs translucides d’aspect récent.

 

Zone de Texte: PolyéthylèneZone de Texte: Saint-Cava

 

L’accumulation ponctuelle (sur quelques mètres au creux d’une cale) sur la plage de Saint-Cava est surprenante. Ils se sont concentrés uniquement à cet endroit. Heureusement, le reste de cette baie magnifique semble indemne.

Les côtes déchiquetées de Bretagne remobilisent facilement les déchets, elles les fragmentent et les dispersent. Je n’ai pas vu de grosses accumulations. La difficulté est de les trouver durant la période estivale après tous les nettoyages de printemps. La présence des macrodéchets facilite grandement la recherche. Sans eux, la quête est beaucoup plus longue et difficile.

Les vacances d’été 2010 m’ont permis aussi de prospecter à la sortie nord de la rade de Brest : la présence des pellets est anecdotique au Conquet et nulle dans la rade. Ce sont mes seules observations pour la Manche occidentale.

 

 

 

 

b)   Sous-région Mer celtique

 

Malheureusement, une journée sur l’île d’Ouessant m’a dévoilé la triste réalité de leur existence au large du continent. Ponctuellement mais de façon évidente, ils étaient piégés dans des dépôts d’algues, dans la baie de Lampaul à l’abri des vents furieux.

Comme ailleurs, ils étaient majoritairement (88%) blancs translucides, jaunâtres, grisâtres, quelques noirs (11%) mais pas de « recyclés ».

Sur la face nord de l’île, sur les côtes soumises aux vents, il n’y a presque pas de dépôts de débris, j’ai rencontré parfois quelques bouteilles déchiquetées, détruites, mais pas de pellets.

La violence des vagues y réussit à exploser des bouteilles en polyéthylène téréphtalate, même fermées !

(des bouteilles d’eaux gazeuses fermées sont comme lacérées verticalement par la rupture du matériau, les bouchons en polyéthylène sont restés en place sur leur pas de vis…)

 

 

c)      Sous-région Golfe de Gascogne

 

De Brest au Morbihan, je n’ai pas fait d’observations sur site. Je sais que ces pellets sont présents en Morbihan (Etel & Erdeven), grâce aux prélèvements effectués par Jane Gollan pour IPW et le Dr.Takada.

Cette personne, amie du Dr.Van Franeker, a fait passer mon appel à l’aide associative dans les réseaux d’ornithologues bretons et normands.

Mes recherches fluviales sur La Loire durant l’été 2009, de Angers à Saint-Nazaire, ne m’ont pas permis de répertorier un seul dépôt de déchets flottants et je ne cherchais pas les granulés plastiques industriels sur ce fleuve naturel.

Je pense aujourd’hui que l’estuaire devra être revisité pour la recherche des pellets. (mission Loire en août 2011 voir Observations sur fichier Excel)

Des témoignages glanés sur Internet ou reçus par mail (en interrogeant des bénévoles des Initiatives Océanes 2011) m’ont permis de savoir que les pellets sont présents à la sortie de La Loire (Turballe, Batz-sur-mer, St-Brévin ?), sur l’île de Noirmoutier, sur l’île d’Oléron, sur la rive droite de l’estuaire de Gironde (en aval de Royan). (puis missions Loire et Rochelle-Oléron en  aout 2011)

 

 

 

Aquitaine

 

J’ai préparé cette mission afin d’optimiser chaque journée. J’avais prévu mes déplacements sur la rive gauche de la Garonne, sur l’estuaire de la Gironde puis de toute la façade Aquitaine jusqu’à Bayonne. Les sites ont été sélectionnés sur les cartes IGN et par les images satellites.

Les observations du site Internet surfrider64.com et de leurs bénévoles ont été précieuses.

 

Sur la rive gauche de Garonne et Gironde, je n’ai pas trouvé d’accumulation ancienne de granulés plastiques industriels, seulement une laisse de fleuve récente. Les macrodéchets sont très présents en aval immédiat de Bordeaux, bien que les abruptes berges de vases ne soient pas propices aux dépôts.

Je n’ai trouvé aucune accumulation dans les vasières (shorres) et les « prairies » de roseaux de l’estuaire.

Il me semble qu’un granulé noir plat est une caractéristique fluviale mais les observations sur cette seule rive gauche sont trop peu nombreuses. (témoignages Internet : les granulés plastiques industriels semblent très connus sur la rive droite touristique en aval de Royan)

 

Sur le littoral d’Aquitaine à partir de la Pointe de Grave, on trouve la présence de petits granulés plastiques industriels rouges.

 

          Petits Rouges d’Aquitaine

 

En Aquitaine, l’abondance de médias filtrants est souvent très visible (voir effrayante) et focalise l’attention. (Voir les généralités sur ce nouveau plastique dérivant page 23) On oublierait presque les granulés blancs translucides au milieu de tous ces débris plastiques.

De Montalivet jusqu’à la pointe du Cap-Ferret, les pellets sont présents sur une grande largeur, comme concentrés à la surface du sable fin, par les nettoyages mécaniques. Les différences de densité sont dues à la couche de plage qui se redépose derrière l’engin.

L’impression de pollution est grande mais la densité reste discrète, ponctuellement moyenne à cause de ces engins.

Les petits rouges d’Aquitaine sont toujours la, au milieu des différents médias filtrants et des cotons-tiges.

Mais aussi une image récurrente à laquelle je ne portais pas attention avant, sauf durant le tri des prélèvements : la présence systématique de graines de liserons décolorées par l’eau de mer (?). (Calystegia sepium)

Sur tout le littoral français, j’ai rencontré ces graines rondes dorées d’environ 5mm, strictement aux mêmes endroits que les granulés plastiques industriels. Mais leur forme ovoïde, leur aspect naturel ne permet pas de se tromper plus que cela.

 

Le bassin d’Arcachon ne semble pas touché, ce qui peut paraître miraculeux.

La plage de Biscarosse observée plus au sud est presque indemne alors que les macrodéchets et sphérules de polystyrène expansé sont nombreux.

Une zone de pollution importante s’annonce avec Mimizan, les plages y sont nettoyées mécaniquement sur des kilomètres (à cause des macrodéchets et des nombreux cotons-tiges) jusqu’à la zone militaire interdite (?). La densité de pellets y est discrète (à faible) sur une grande étendue (dite « forte »), large de 25 mètres.

Une douzaine de kilomètres plus bas, la plage de Contis cumule tous les débris : la densité des granulés plastiques industriels y est parfois moyenne sur une grande surface avec un linéaire fort. Les fragments plastiques et les macrodéchets accompagnent les médias filtrants sur cette plage nettoyée mécaniquement. C’est la plus forte concentration de médias filtrants que j’ai pu observer : jusqu’à 50 spécimens au mètre carré en surface ou à demi enterrés dans le sable.

Comme prévu, le pic d’observation de pellets est atteint quelques 25 kilomètres plus au sud. (Témoignages nombreux du site Internet Surfrider64 )

L’état de la réserve naturelle de Moliets et du Courant d’Huchet m’ont donné autant de frissons que la découverte des granulés au Havre ou à Ouessant…

 

© sites-nature.aquitaine.fr

 

Cet endroit majestueux a subi des vagues de plastiques incroyables, alors que

les lieux avaient déjà eu droit à des grands nettoyages manuels et mécaniques depuis avril 2010, à ma connaissance…

 

A la rédaction de ce rapport initial, il y a deux endroits emblématiques en France, pour les granulés plastiques industriels dérivants dans le milieu marin :

L’estuaire de La Seine au Havre et le Courant d’Huchet.

 

La petite rivière, qui longe la dune sur plusieurs kilomètres avant de rejoindre l’océan, a subi une marée pétrochimique multicolore.

Cela n’a sûrement rien à voir avec le désastre d’une marée noire mais l’expression représente bien les marées de vives eaux, cumulées probablement à une forte houle, qui amena autant de fragments, de débris et de granulés plastiques industriels.

Au-dessus du chemin qui longe le ruisseau, sur une hauteur de 2 mètres, il reste des microdéchets et des pellets, mélangés au sable, aux végétaux.

Les petits granulés rouges Aquitaine sont toujours là. Les médias filtrants sont un peu moins nombreux qu’à Contis mais il y a de gros spécimens blancs (type K3), les cotons-tiges finissent le tableau.

Je comprends que cette vision provoque la colère des habitants de la région, dans ce décor magnifique, unique et fragile.

 

Présence moyenne (ponctuellement forte), étendue linéaire forte.

 

A peine 5 kilomètres au sud et la présence des pellets redevient discrète à Messanges. Aucun granulé rouge Aquitaine ? Il n’y a même plus d’accumulation ancienne visible dans la dune en pente douce (alors que le bois et les macrodéchets sont là ?). La mer semble reprendre facilement les laisses de granulés récentes en pied de dune.

 

Même constat de discrétion sur la plage du Vieux-Boucau sauf dans le sillage des tracteurs de nettoyage (densité moyenne ponctuelle).

Le courant du Vieux-Boucau semble avoir subi le même phénomène qu’à Moliets. La pollution est cependant beaucoup moins sévère, elle ressemble à un débordement du courant. Les densités observées sont ponctuellement moyennes à fortes sur 6, 10, 25 mètres par endroits. Mais les tracteurs effacent puis concentrent leur présence.

 

A 20 kilomètres de là, on constate un nouveau pic de densité sur la pente légère de la belle plage des casernes à Seignosse.

Elle crée un gradient : densité discrète en haut, moyenne en bas.

Cette dernière plage polluée pourrait être la fin d’une nappe de granulés plastiques industriels, d’une marée de pellets se dirigeant vers le nord ? (ou le début d’une nouvelle nappe polluée qui arriverait justement sur cette plage de Seignosse ?)

La densité moyenne dans les laisses récentes puis l’absence de pellets au sud (témoignage Surfrider Pyrénées Atlantiques) pourrait le faire penser.

Tous les autres déchets et débris plastiques sont très présents à Seignosse. (médias-filtrants, cotons-tiges, fragments,…)

 

Arrivée sur Labenne-Océan et l’embouchure de l’Adour : la présence est très discrète ou impossible à déceler (plage de graviers à Tarnos)

Les petits granulés Aquitaine sont toujours là.

Une observation de quelques pellets a été faite sur l’Adour mais ne permet pas de savoir si c’est une pollution terrestre ou maritime. (site trop proche de l’embouchure) Présence discrète de granulés blancs translucides, sur un linéaire moyen. Présence de médias-filtrants mais pas de macrodéchets sur la rive nettoyée manuellement (Port de Bayonne)

 

Il faudrait poursuivre ces observations vers la frontière avec à l’esprit que les pellets pourraient venir aussi du nord de l’Espagne ?

(l’origine des macrodéchets rappelle cette proximité)

d)      Sous-région Méditerranée

 

Un témoignage de présence obtenu pour Argelès-sur-mer. (Il faudrait prendre le temps d’interroger plus de bénévoles pour les zones non visitées afin d’orienter les éventuelles futures missions)

 

          Camargue et golfe de Fos-sur-mer

 

La mission réalisée en Méditerranée a ciblé l’estuaire du Rhône et le golfe de Fos-sur-mer : des Saintes-Maries-de-la-Mer au Cap Couronne (Martigues).

Je n’ai pas trouvé de pollution évidente liée à la présence des zones pétrochimiques de Fos et de l’Etang de Berre (non visité).

Les sites les plus abondants en granulés plastiques industriels sont la Darse N°2 de Fos puis à proximité immédiate, une darse conchylicole et la plage du Cavaou à Fos-sur-mer. Ces accumulations sont proches des producteurs de pellets connus de la zone portuaire.

 

En général, sur les sites visités, les amas de granulés semblent anciens et très dispersés par les vents. Les laisses de mer « historiques » semblent être discontinues parfois.

Je pense que les vents nombreux sont des paramètres importants pour la diffusion des pellets sur ce littoral Méditerranéen. Les billes plastiques sont parfois « balayées » très loin dans le supralittoral et au-delà : j’ai pu les retrouver sur les espaces de stationnement des plages, jusqu’à 40 mètres de la mer !

La pollution semble se concentrer derrière les obstacles (sous le vent), elle parait alors discontinue et non-linéaire.

 

          Une quantité très discrète de granulés est présente sur les berges du petit et grand Rhône : ils viennent de l’amont du fleuve. (Il y a également une forte présence de sphérules de polystyrène expansé sur le grand Rhône)

Depuis les Saintes-Maries-de-la-Mer, la densité augmente en se rapprochant du golfe de Fos. Sur les immenses plages de l’estuaire, je n’ai pas trouvé de laisses de mer récentes.

Les fascines censées retenir le sable et protéger les étangs de Camargue forment des obstacles (décris ci-dessus). Ils concentrent, et retiennent à l’abri des vents, les débris, les granulés et les sphérules de polystyrène expansé. Je pense que malgré cela, ces polluants sont probablement rentrés jusque dans les lagunes.

J’ai pu constater fortuitement la présence des pellets au milieu des oiseaux.

Sur une route magnifique au milieu des étangs salés et des bancs de sable du delta, le pied de la digue carrossable était souillé par des granulés plastiques mélangés aux végétaux du marécage.

 

La densité de granulés plastiques industriels est souvent discrète, mais une caractéristique attire l’œil : la présence de granulés rouges et de gros spécimens ambrés (pastilles) d’environ 6 à 8 mm.

Aucun noir recyclé…

Rouges « Fos »          Pastilles ambrées

 

Les granulés rouges sont visibles depuis les Saintes-Maries-de-la-Mer jusqu’à Martigues (Calanque des renaires). Il sont absents de la pointe de Carro et du Cap Couronne.

Comment expliquer cette transition brutale alors que l’Anse de Sainte-Croix à la Couronne (Martigues) est une grande zone d’accumulation ?

C’est une grande plage de sable fin qui est recouverte de pellets (sauf dans la laisse récente) sur presque toute sa surface : densité discrète à faible.

 

L’ensemble des observations discrètes (ou d’absence) alternant avec des zones d’accumulations perturbées ou discontinues me fait penser à une pollution ancienne qui est très dispersée. (L’absence de laisse de mer récente également)

Le Mistral aurait-il pu chasser les granulés plastiques industriels des darses de Fos-sur-mer ?

Un contre-courant du Rhône associé au Mistral les dirige vers l’Est, vers Marseille et l’île de Frioul. Les observations du Docteur Isabelle Poitou (association MerTerre) vont dans ce sens. Elle a pu observer des granulés plastiques industriels mélangés à des roseaux du Rhône sur l’île de Frioul : pour elle, pas de doute…

L’observation, faite par elle, de milliers de petits morceaux de plastiques plats de toutes les couleurs, me fait penser à du plastique destiné au recyclage (transformé en paillettes). J’ai constaté des fragments similaires en Aquitaine (Contis, Moliets,…)

Je n’ai pas remarqué beaucoup de macrodéchets sur cette petite partie du littoral méditerranéen (sauf sur les rives du grand Rhône) : les plages sont souvent nettoyées en hiver ? Pas de déchets liés à l’activité de la pêche ?

 

Var

 

L’observation sur l’île de Port-Cros dans le Var émane d’un ami ornithologue qui travaille pour le Dr.Van Franeker.

 

Corse

 

L’unique observation corse est un témoignage (incognito). Les quelques photos du site pollué montrent ponctuellement une densité forte ainsi qu’une dominance des pellets blancs translucides et ambrés. A vérifier in situ…

 

5)   Autres déchets anthropiques

a)   Les médias filtrants

 

Les médias filtrants sont de nouveaux intrus des milieux aquatiques.

                    © surfrider64.com

 

L’association Surfrider Pyrénées Atlantiques est spécialiste du sujet.

J’ai découvert avec eux la perte de millions de médias filtrants sur la Seine à Corbeil-Essonnes - Evry.

 

Depuis toute la vallée, le Parc Naturel Régional et l’estuaire de la Seine sont envahis durablement par ces objets indésirables…

En à peine deux mois, ils ont atteint la mer !

(présence constatée à Honfleur puis Calais…?)

 

Ce nouveau microdéchet d’environ 1 centimètre a envahi nos plages. C’est une véritable marée de roulettes plastiques que j’ai observé dans les laisses de Mer.

Certaines plages de la côte Aquitaine sont très durement touchées par cette nouvelle pollution : jusqu’à 50 spécimens au mètre carré !

 

Carte des témoignages surfrider64 – 2010

Carte des témoignages surfrider64 – 2011

Carte des observations SOS Mal de Seine – mise à jour novembre 2011

 

Ces «bio médias filtrants» sont utilisés dans le traitement des eaux usées : dans les stations d’épurations, dans l’industrie agroalimentaire, la pisciculture, les aquariums et sur certains navires.

Ces médias filtrants améliorent la dégradation bactériologique, ils servent de supports aux bactéries.

On les trouve aujourd’hui dans les rivières, les fleuves et la mer suite à des incidents, des fuites régulières ou massives.

 

 

 

 

 

b)   Les géotextiles

 

Les géotextiles (ou géosynthétiques) sont utilisés pour stabiliser les berges, les talus, réaliser des enrochements, des chemins carrossables. Ils sont employés  en horticulture, en agriculture, au pied des végétaux.

Ces matériaux sont également mis en œuvre pour créer ou consolider des digues, des bassins portuaires, des dunes…

Ces Géoplastiques merveilleux n’offrent pas toujours une solution fiable et pérenne pour l’endiguement et la protection contre les inondations

 

Rappel :                Les engagements du Grenelle de la Mer.

Réduction drastique des pollutions d'origine tellurique et gestion des macro-déchets * : Pour le confortement des rives, employer des membranes exclusivement composées de fibres végétales. Quand l’emploi de géotextiles synthétiques est considéré comme nécessaire par les organismes compétents, veiller à ce qu’ils soient régulièrement remplacés ou entretenus pour éviter leur fragmentation dans le milieu naturel.

(* Livre bleu page 39)

 

Ces géotextiles qui ressemblent à du tissu se dégradent assez rapidement dans un milieu naturellement agressif comme un fleuve ou la mer.

(UV, érosion mécanique et thermique, chocs, marées, batillage, houle, etc…).

 

Résultat : des morceaux importants de moquettes synthétiques partent dans l’eau.         Le problème ?      Leur composition.

(exemple : 70% polypropylène + 30% polyéthylène)

 

J’ai découvert ces géosynthétiques non durables à différents endroits du littoral, de Dunkerque aux Saintes-Maries-de-la-Mer, sur des berges, des digues ou des dunes disloquées.

 

Document photographique en PDF sur google documents.

 

Ce matériau plastique est présent partout : sur nos routes, nos rond-points, nos espaces verts… Son utilisation est croissante dans le bâtiment et les travaux publics.

Sur les zones végétalisées artificielles, dans les champs et nos jardins, ce matériau permet des économies d’eau, d’herbicides mais aussi d'emplois.

 

Son utilisation se généralise au bord des rivières, des fleuves et du littoral…

Ce matériau devient rapidement un macrodéchet, Il se fragmente sous l’action de la végétation, de la force hydraulique et au fil du temps par les différences de température, d'ensoleillement et d'humidité…

Il devient microplastique pour polluer le cycle de l'eau et notre environnement.

 

 

 

 

c)   Déchets divers

 

·       Des résidus de production (?) d'une mauvaise synthèse de polyéthylène  (?) (Analyse IRTF effectuée) forment des gros blocs de quelques centimètres très friables, ils se fragmentent facilement. On les retrouve dans les laisses de mer à proximité et devant le port de Dunkerque (de Oye-plage jusqu’à Zuydcoote à la frontière belge).

 

·       Beaucoup de morceaux de paraffine solide ou de cires de polyéthylène (Analyse IRTF effectuée) sous forme de savonnettes, de pains, de plaques se trouvent sur les plages, de Dunkerque à Boulogne-sur-mer, par exemple. Nous serons plus attentifs à l’avenir à ces résidus de fond de cales des navires.

(voir vidéo IMARES à la huitième minute du documentaire)

 

·       Des nodules ferreuses (différentes des marcassites) ont envahi une partie de la plage sauvage à l’est de Calais (presque en face du phare de Walde)


6)      Surveillance et diminution de cette pollution

 

La méthode d’observations mise en place n’est pas très rigoureuse mais était également destinée à une utilisation par d’autres bénévoles.

Je n’ai pas pu comparer l’observation d’un site par plusieurs bénévoles sauf pour les plages de :

·       St-Etienne-au-Mont (62) avec les Robins des bois : nos observations avec mes critères imagés sont identiques.

·       Lacanau (33) avec le comptage des lycéens de Bordeaux : confirmation des critères.

La méthode d’observations par ces critères imagés permet de qualifier une plage, un site à l’instant « t ». Les granulés sont sans cesse rejetés sur la plage jusqu’au supralittoral ou alors repris par la vague suivante. Un site, une plage ne peut pas voir sa qualification baisser (sauf en cas d’érosion soudaine très importante)

Le résultat de la qualification des sites (cahier de terrain) me semble convenable.

 

Les prélèvements effectués sont peu rigoureux scientifiquement mais donne une idée de la densité visualisée sur les sites.

Le prélèvement rapide et ponctuel dans la laisse de mer « historique » du supralittoral donne une concentration en grammes de pellets par litre. Il permet d’avoir une idée supplémentaire de l’accumulation maximum rencontrée sur le site.

Exemple du port de plaisance du Havre : la dizaine de prélèvements était assez reproductible mais il s’agissait d’un cas idéal.

 

Ailleurs, il vaut mieux manier ces résultats uniques (faute de temps) avec précautions. Les accumulations étudiées sont hétérogènes et formées sur des sols différents, il serait hasardeux de trop vouloir les comparer.

 

Aussi, les prélèvements avec des taux qui s’approchent ou dépassent les 100g/l de pellets dans le maximum de l’accumulation « historique » concernent des sites relativement très pollués, probablement à proximité d’une source de diffusion ou de perte.

 

NB :

On pourrait perfectionner ces prélèvements, les multiplier.

Nous avons imaginé une méthode de prélèvement à plus grande échelle. La reproductibilité serait améliorée mais le résultat serait toujours une concentration ponctuelle (voire une moyenne de concentrations) dans le maximum d’accumulation visible, dans la laisse de mer « historique » hétérogène, sur quelques dizaines de mètres.

Méthode utilisée sur des plages de sable dans cette publication brésilienne.

 

Toutefois, l’ensemble observations + prélèvements rapides permet de donner une « cartographie » des sites plus ou moins touchés par cette pollution.

Cela peut donner des priorités d’actions ou d’investigations pour agir, pour tarir la ou les sources.

Il faut trouver des explications à ce constat de pollution par zones mais ne pas chercher à comparer les sites entre eux à l’aide des uniques résultats en grammes par litre.

 

Carte de France des observations

de granulés plastiques industriels caractéristiques.

 

 

La découverte de granulés caractéristiques permet de dessiner des zones polluées par une source probablement unique.

Avec une connaissance des courants côtiers, des flux des masses d’eaux, j’espère que l’on pourra identifier ces sources.

Il serait important que nous puissions inspecter l’état des bassins industriels et portuaires et plus en amont, les fleuves, les rivières à proximité des producteurs ou utilisateurs de pellets.

Je sais maintenant bien découvrir ces granulés et malheureusement, ils sont bien présents sur les sites que j’ai pu examiner. (66% de présence sur mes observations)

 

Comment installer une surveillance de cette lente pollution de nos côtes ?

Je pense déjà à une possibilité de dépollution de certains sites.

Une fois ces sites remis à nu, une surveillance serait mise en place ?

Pour des sites naturels sensibles, la dépollution serait beaucoup plus complexe.

Faudra t-il se résoudre à installer des barrages anti-pollutions devant les sites écologiquement remarquables ?

Comment faire pour ne plus voir ces granulés plastiques industriels envahir le Courant d’Huchet par exemple ?

Car comme tous les débris plastiques dérivants, ils flottent en surface mais aussi dans la colonne d’eau…

On pourrait privilégier certains sites et vérifier régulièrement qu’il n’y a pas eu d’engraissement de la laisse « historique », voir si la densité visible, la concentration maximum, n’évoluent pas ?

 

 

Nos préconisations pour une diminution de ces pertes de granulés plastiques industriels dans l'environnement :

 

Le Livre Bleu des engagements du Grenelle de la Mer et les recommandations du groupe de travail « déchets en milieux aquatiques » du Grenelle de l’environnement – 2009 :

 

·       Les petits déchets de quelques millimètres comme les granulés de plastiques, matière première de l’industrie plasturgique, échappent à toutes les opérations de comptages sur le littoral et en mer. Ils sont cependant un indicateur important.

 

Développer un suivi quantitatif et qualitatif spécifique aux petits déchets comme les granulés de plastique, paillettes, petits fragments de dégradation des emballages sur certains sites d’accumulation littoraux représentatifs en collaboration avec les scientifiques nationaux ou internationaux ou représentants des industries intéressées et en mer. Exercer des surveillances analogues sur les sites de production industrielle en relation avec les Agences de l’Eau et les DREAL19 et au débouché des émissaires.

 

 

 

·       La production, le transport, la transformation et le recyclage de certaines matières premières de l’industrie pétrochimique comme les granulés et paillettes de plastiques conduisent à des pertes de confinement. Ces déchets présents au niveau mondial échappent aux opérations régulières ou exceptionnelles de ramassage et constituent un risque avéré de contamination des chaînes alimentaires marines, notamment pour les oiseaux. Il convient d’améliorer les conditions de confinement pendant la fabrication, la transformation et le transport multimodal.

 

Renforcer la formation réalisée par les fédérations professionnelles des producteurs, transformateurs et des transporteurs à travers par exemple la rédaction de guides de bonnes pratiques sur le confinement en toutes circonstances des granulés et paillettes. Des actions de contrôles réglementaires auprès des professionnels des secteurs concernés sont aussi souhaitables.

 

 

Nous suggérons fortement d’appliquer les recommandations de 1992 de l’Agence de protection de l’environnement des États-Unis (EPA) et de réaliser partout l’ Operation Clean Sweep comme aux USA  (ACC & SPI 2010) ou au Royaume-Uni (SAS.uk et BPF)…

 

Nous sommes impatients de voir des actions concrètes suite à l’engagement mondial des plasturgistes durant la 5ième conférence internationale de Hawaii en mars 2011 sur les déchets marins.

 

Nous devons considérer ces matériaux plastiques à leur juste valeur : ce sont des molécules ou des composés chimiques, avec les conséquences d’usages, d’hygiène et de sécurité que cela impose.

 

Une première étape :

 

L’Union Européenne doit réglementer la production, le conditionnement, le transport et l’usage de ces granulés plastiques industriels…

 

 

 

 

 

 

 

Quelques références…

·       Expédition Méditerranée En Danger : les microdéchets 2010-2013

·       La Recherche : Les côtes polluées par des microparticules de plastique. 2011

·       Environmental Science & Technology :

Nos machines à laver : source de microplastiques.. 2011

·       Plastic Pellets in the Aquatic Environment - EPAUSA - 1992

·       Opération Clean Sweep  American Chemistry Council & SPI –USA – 2010

·       Surfers Against Sewage Larmes de Sirènes et SAS vidéo – UK – 2007

·       5ième Conférence internationale sur les débris marins  – Hawaii - 2011

·       Global Plastics and Plastic Product Producers Take Action on Marine Litter - 2012

·       Directive Cadre Stratégie pour le Milieu Marin (DCSMM) - IFREMER

Caractéristiques et état écologique : Contributions thématiques, chapitre B II.2 – 2012

 

 

 

Remerciements

 

·       Docteur François Galgani de l’IFREMER – LER/PAC

·       Le collectif de l’expédition MED  « Méditerranée En Danger »

·       Docteur Hideshige Takada pour ses données mondiales disponibles sur www.pelletwatch.org

·       Docteur Van Franeker : IMARES oiseaux marins (OSPAR 2010 : dissection fulmar).

·       Association ADELE Dunkerque    www.assoadele.overblog.fr

·       Association MER TERRE            www.mer-terre.org ODEMA Marseille – Isabelle Poitou

·       Association Robin des Bois         www.robindesbois.org

·       Association Surfrider Pyrénées Atlantiques       surfrider64.com

·       Une internaute de Martigues bien inspirée : bullebio.over-blog.com

·       Les quelques ornithologues bretons et normands.

·       Tous les adhérents de SOS maldeseine…

 

Aux bénévoles que j’aurais pu oublier durant ce petit tour du littoral français…

 

 

 

 

Association SOS Mal de Seine              maldeseine.free.fr             sosmaldeseine@gmail.com

 

Laurent COLASSE